Décidément, la République Démocratique du Congo n’en finit pas avec le tableau sombre des violences sanglantes qui ravagent les populations. A l’Est, dans la Province du Nord-Kivu, la résurrection du groupe rebelle, le M23, a envenimé les relations avec le Rwanda accusé de soutenir le groupe rebelle, alors que le gouvernement rwandais nie ces accusations. A l’Ouest, c’est la Province du Mai Ndombe qui est touchée par des vagues de violences inter-ethniques entre Téké et Yaka. Ces violences auraient déjà fait plus de 180 morts, depuis le mois de juin dernier, selon les autorités locales du Mai-Ndombe, alors que des milliers de personnes fuient cette province pour se réfugier dans la Province voisine du Kwilu et en République du Congo, dans les Districts de Ngabé et d’Ignié, en traversant le Fleuve Congo.
Rien ne va plus entre Kinshasa et Kigali depuis que le M23 a repris, à partir du 20 octobre dernier, ses offensives armées dans la Province du Nord-Kivu. La rébellion armée à dominante tutsi, qui bénéficierait de l’appui des autorités rwandaises, selon un rapport officiel des Nations unies, avait pris le contrôle des cités de Rutshuru-centre et Kiwanja, dont une grande partie du territoire de Rutshuru, provoquant d’importantes vagues de populations déplacées. A partir du 27 octobre, les rebelles ont même tenté de s’approcher de la ville de Goma, chef-lieu de la Province du Nord-Kivu, affrontant l’armée congolaise qui aurait du mal à les repousser.
La réaction de Kinshasa a été d’expulser l’ambassadeur rwandais, Vincent Karega, dont le pays est accusé par le gouvernement congolais de soutenir les rebelles du M23. Dès le samedi 29 octobre, le Conseil supérieur de la défense avait demandé au gouvernement «d’expulser, dans les 48 heures suivant sa notification, Vincent Karega, l’ambassadeur du Rwanda». Kigali n’a pas pensé réagir de la même manière, mais c’est le gouvernement de Kinshasa qui a rappelé pour consultation, son ambassadeur assurant l’intérim à Kigali.
Dans son communiqué, le Conseil supérieur de la défense a soutenu qu’il a été «observé, ces derniers jours, l’arrivée massive des éléments de l’armée rwandaise pour appuyer le M23». Pour le porte-parole du gouvernement de Kinshasa, il s’agit là d’un «énième coup porté aux processus de paix de Nairobi et de Luanda» qui appelle à la cessation des hostilités et au retrait des rebelles.
Le 3 novembre, dans un message à la Nation, le Président Félix Tshisekedi a lancé un appel, pour mobiliser les jeunes de la Province du Nord-Kivu à s’enrôler dans l’armée, afin de stopper l’avancée des rebelles vers Goma. Les F.a.r.d.c (Forces armées de la République Démocratique du Congo) recrutent ainsi plus de deux mille jeunes, pour renforcer ses rangs dans le Nord-Kivu.
Depuis mardi 8 novembre, les F.a.r.d.c ont entrepris de bombarder, à l’aide de deux avions de chasse de type Sukhoï-25, de fabrication russe, stationnés à Goma, les positions des rebelles dans la zone de Rutshuru. C’est pour la première fois que l’armée passe par les airs pour attaquer les camps ennemis. Mais, ces bombardements ont aussi provoqué des vagues de déplacements des populations.
Depuis avril dernier, les Chefs d’Etat d’Afrique de l’Est ont pris la décision de déployer une Force régionale dans les Provinces de l’Ituri, du Nord et du Sud Kivu, où sévissent de multiples groupes armés, pour faire respecter la paix, en coordination avec les forces de la Monusco (Mission de l’Organisation des Nations unies pour la stabilisation en République Démocratique du Congo). Mais, au plan diplomatique, pas grand-chose n’avance. Seul le Kenya a décidé, le 2 novembre, de déployer ses troupes en RD Congo, pour soutenir le gouvernement congolais face aux groupes armés.
L’Angola a repris sa mission de médiation, mais les risques d’embrasement de l’Est de la RDC sont importants, alors que la tension persiste entre Kinshasa et Kigali.
Jean-Clotaire DIATOU
